La présence du cépage s’amplifie partout dans le monde face à la demande de consommateurs avides de fraicheur
En vin de cépage comme pour les appellations qui le portent, le sauvignon blanc est l'un des cépages les plus cool du moment. Il faut dire qu’il correspond au goût des amateurs, qui s’incline vers des vins vifs, digestes et délicatement parfumés. L’hégémonie du chardonnay un peu boisé est arrivée à son terme, même s’il reste le vitisvinifera blanc destiné à la production de vin le plus planté et internationalisé au monde, avec 210 000 hectares distribués dans 41 pays. Le sauvignon blanc le talonne avec 123 000 hectares de vignes dans le monde, mais affiche une cadence de croissance supérieure. Quinzième cépage le plus planté dans les années 90, il est aujourd’hui remonté à la 8ème position. « C’est un cépage paradoxal, parce qu’il est très facile à reconnaitre quel que soit le lieu, mais malgré tout, il prend l’accent du pays dès qu’il voyage. Sa diversité d’expression le protège. Le sauvignon a cette grâce de n’intéresser personne quand il n’est pas typé.
Beaucoup de vins sont vendus pour le goût qu’ils n’ont pas, le sauvignon ne peut être vendu que pour le goût qu’il a » commentait le grand œnologue Denis Dubourdieu lors d’une conférence au concours mondial du sauvignon en 2010, alors que le cépage avait entamé sa grande ascension. En France, il couvre 29 900 hectares. Le sauvignon blanc représente 27 % des cépages blancs de la Loire et 45 % des cépages blancs du Bordelais, ses deux berceaux français. Dans le Centre-Val de Loire, le connaisseur aime son style épuré, incisif, ses arômes subtils de citrus et d’herbe fraiche évoluant entre le végétal et minéral. Le cépage est au cœur de l’identité de plusieurs appellations, à l’image de Sancerre qui est loin de disposer d’assez de vin pour satisfaire la demande mondiale. Son succès s’explique par la popularité grandissante de son mono-cépage et son positionnement prix attractif. « Nous sommes considérés comme LE vignoble de référence dans le monde pour le cépage sauvignon blanc. Nous nous sommes fait connaître dans les années 70 grâce à notre proximité géographique à Paris, un peu comme cela a été le cas pour Chablis. Nos vins avaient de super rapports qualité/prix et nous bénéficions de très grands terroirs. Avec 2500 hectares alloués au Sancerre blanc, alors qu’il y a 800 000 hectares de vignes en France, nous ne sommes qu’une petite goutte d’eau dans le vase. Cette rareté est créatrice de valeur. La marque est très forte, ce qui fait qu’il n’y a pas assez de vin pour tout le monde » s’enthousiasme le vigneron Matthieu Delaporte à Chavignol.
Dans le Sud-Ouest, le sauvignon blanc, seul ou assemblé au sémillon qu’il allège de sa tension calcaire offre un second souffle aux Bordeaux blancs. « Désormais, les producteurs bordelais affichent le nom du sauvignon sur leurs étiquettes, car c’est un argument commercial fort qui pousse la marque bordeaux blanc » remarque Thomas Costenoble, directeur du concours mondial du sauvignon qui se tiendra en février en Touraine. Dans l’hémisphère Sud, le cépage a trouvé son royaume en Nouvelle-Zélande. Il s’enrobe alors des parfums plus riches de fruits tropicaux, de tilleul, d’asperge et densifie sa chair. Marque de fabrique vinicole du pays, il représente à lui seul 60 % du vignoble et est supporté par une considérable force marketing. Entre 2000 et 2017, la plantation de sauvignon blanc du pays a augmenté de 850 %, passant de 2400 hectares en 2000 à 20 500 hectares en 2018. L’Espagne, le Chili, l’Afrique du Sud, l’Australie ou encore les États-Unis, continuent de le planter pour satisfaire la soif mondiale. Cette ferveur est portée par les marchés anglais et américain ; « Sancerre, c’est une marque tendance là-bas. Aujourd’hui, si tu veux commander un verre de blanc un peu stylé dans un endroit un peu stylé, tu prends du Sancerre. Les Américaines sont excitées de dire le mot ! » s’amuse Matthieu Delaporte du haut de son tracteur, bien loin detout ce remue-ménage.